yin yoga slow down
là, tout n'est qu'ordre et beauté,
lenteur, calme, et fluidité ( ;
Lorsque philosophie et médecine traditionnelle chinoises croisent le hatha yoga et ses postures (au sol pour la plupart), la rencontre en terres indiennes s'effectue autour du souffle et du temps que l'on se donne à sentir, laisser corps et esprit s'assouplir à leur rythme, à se laisser sculpter par l'espace et sa pesanteur...
le déroulé d'une séance
=> Votre séance de Yin Yoga méditatif dure environ 90 minutes
- nous commençons par une assise méditative
- puis, plusieurs postures vont se suivre. Rarement plus d’une dizaine dans la séance. Car, en effet, l’une des spécificités de cette pratique, proche du Hatha Yoga, est le temps que nous nous donnons à vivre chaque posture. Le maître-mot de cette approche serait la lenteur. C’est d’ailleurs pour cette raison que le Yin yoga est recommandé aux personnes qui souhaiteraient méditer mais n’ont pas (encore) la patience de pratiquer plus de quelques minutes la posture assise en (quasi) immobilité : au moins changeront-ils-elles de postures plusieurs fois dans ce contexte ^^
les postures
=> elles ressemblent à celles du corpus du Hatha Yoga (au sens large ici). La durée en est précisée par votre enseignante en fonction de leurs effets (qui ont été étudiés par les fondateurs du Yin yoga à travers la grille théoricopratique de la Médecine Traditionnelle Chinoise et de son acupuncture entre autres).
Cependant, il est toujours possible et même conseillé de quitter une posture que l’on ne sentirait pas, ou plus, pour quelque raison que ce soit. Non sans avoir au préalable essayé plusieurs ajustements parmi tous ceux proposés, et nous utilisons donc ici souvent des supports : coussins, couvertures, cales...
=> comme il en était aussi question dans la Hatha yoga pradîpikâ, la plupart des postures se font, dans cette approche, au sol (mises à part deux ou trois).
=> à la différence du Hatha Yoga traditionnel et de ses dérivés (Vinyasa…), la plupart des étirements, qui sont au centre de l’approche posturale du Yin yoga, sont passifs. C’est-à-dire qu’ils n’engagent pas de contraction musculaire (« excentriques » en H.-Y.). A tout le moins dans la région qu’il nous intéresse d’étirer-assouplir, les muscles sont décontractés.
une pratique qui met à mal les clichés (éculés) d’un alignement postural qui serait le même pour tou.te.s
=> comme dans toute approche de Yoga postural, et plus largement en cohérence avec l’éthique du Yoga, la pratique vise à rééquilibrer l’énergie en direction d’un état d’être pacifié, dénoué, détendu. Autrement dit, tout ce qui pourrait faire survenir une douleur doit être évité. C’est pour cette raison que de nombreuses variantes pour chaque posture vous sont proposées, et que les formes que prendront alors le corps ne cadreront jamais tout à fait avec une théorie puisque l’expérience subjective est en jeu et que nous considérons ici le corps non séparé du sujet qu’il incarne.
De là, le Yin yoga a de quoi surprendre, surtout si nous avons grandi en Yoga avec le mythe contemporain (le fétiche ?) de l’« alignement » qui vaut pour tou.te.s et sur lequel les premiers enseignant.es du Yin yoga sont revenu.es - ils et elles n’étant pas les seul.es.
approfondir
Conseillons ici la lecture des ouvrages d’un élève de Paul et Suzee Grilley (qui ont initié et développé avec Sarah Powers l’approche Yin Yoga dans les années 1990 suite aux enseignements de Paulie Zink qui officiait alors dans les arts martiaux et s’était intéressé à l’énergétique taoïste), Bernie Clark. Ses ouvrages sont toujours très documentés et précis, ils mettent en évidence l’ineptie et le danger qu’il y aurait à imposer un moule pour la variété des corps-esprits que nous sommes :
Votre corps, votre yoga [Your Body, Your Yoga, 2016]. Vigot, 2019.
Mentionnons également l’ouvrage de l’une de nos formatrices (avec Valentina Duna), Cécile Roubaud :
Yin yoga. First Editions, 2018.
=> ce manuel est une bonne base pour pratiquer chez soi en autonomie, en plus d’être vraiment agréable à lire (joli <3) :
intérêts de la pratique
et pour qui ?
cette approche posturale
convient à TOU.TE.S ^___^
quelques précautions seront à prendre cependant
en cas d’hyperlaxité et hypermobilité
une pratique
particulièrement conseillée
pour celles et ceux qui :
- souhaitent ralentir
=> les méditant.es bien sûr mais aussi celles et ceux qui ne se sentiraient pas encore prêt.es pour la méditation assise ou ne souhaitent pas la pratiquer
- ne souhaitent pas enchaîner les postures sur un rythme trop rapide et préfèrent rester près du sol pour tout un tas de raisons
- ont une pratique sportive par ailleurs, ce qui nécessite toujours le besoin de s’étirer intelligemment et profondément
- souhaitent prévenir l’ostéoporose et l’arthrose et plus généralement, cultiver la santé de leurs articulations, des tendons, des fascias (voir plus bas) aussi… (bien évidemment tout cela en synergie avec un tas d'autres facteurs)
comment oeuvre la pratique ?
quels sont ses effets ?
La pensée chinoise traditionnelle a développé le concept Yin-Yang.
=> « Yin » y recouvre, dans et de l’existant, le processus de ralentissement, ce qui descend, devient humide, refroidit… ce qui n’est jamais, pas plus que son complémentaire Yang, une qualité en soi, une essence figée. Ce qui faisait dire aussi à Wang Bi, au IIIe siècle de notre ère :
« Yin, c’est ce qui va devenir Yang ;
Yang, c’est ce qui va devenir Yin. »
En se donnant le temps d’expérimenter telle ou telle posture (3, 5 minutes voire plus), le Yin yoga va étirer profondément le corps jusqu’aux tissus conjonctifs, considérés comme « Yin* » par la MTC : les tendons, les ligaments (oui c’est possible mais doucement), plus largement les os des articulations, et le(s) fascia(s). Sans risque de se blesser s’il n’y a pas de contre-indication, le rythme de pratique s’accordant à la temporalité des tissus conjonctifs (les solliciter trop rapidement les violenterait et nous risquerions alors de nous blesser).
Aussi, la pratique du Yin Yoga peut-elle être intense : l’ampleur de mouvement de l’articulation sollicitée dans une posture pouvant aller quasiment à son maximum (sauf s’il y avait quelque contre-indication que ce soit bien sûr), et ce, dans toutes les directions qu’elle peut prendre. Ce « stress » (simplement au sens de pression ou de tension ici) va renforcer la région sollicitée tout en régulant la teneur en collagène des tissus (pour un équilibre fondamental entre solidité et souplesse de ces derniers), en favorisant même la qualité.
résultats :
=> une souplesse accrue, déterminante pour la motilité du corps sur le plus long temps possible, et, donc, pour notre autonomie. D’autres effets ne sont pas sans intérêt, le lien par exemple entre hydratation et stimulation des fascias a été démontré, ce qui là encore, bien plus que la dimension cosmétique ici, a son importance pour cultiver la bonne santé de l’ensemble du corps.
sur un plan plus subtil, comme tout Yoga, l’approche Yin maintient et développe une circulation fluide de l’énergie vitale
=> nous renvoyons ici à la lecture du manuel de Cécile Roubaud qui synthétise bien les choses en nous rappelant notamment que la plupart des postures Yin se concentrant sur le bas du corps, ce sont par conséquent les méridiens correspondant au foie, à la vésicule biliaire, à la rate et au pancréas, à l’estomac, aux reins et à la vessie, qui vont être stimulés plus que d’autres.
Précisons que cet aspect, même s’il est présent sans qu’il n’y ait besoin de l’expliciter à travers la grille de lecture de la MTC lors d’une séance, n’est pas celui que nous avons choisi de développer en priorité dans nos cours, ayant préféré mettre davantage l’accent sur la dimension méditative de l’approche, ce qui, bien sûr, n’en exclura en rien les effets positifs ici.
nous pensons que la dimension méditative de cette approche, du fait du temps que chacun.e prend, à vivre sa posture, est l’un de ses aspects les plus intéressants et parlera à tou.te.s celles et ceux qui souhaitent cultiver une qualité de présence apaisée.
revenons ici sur le(s) fascia(s)
=> contenant à l’intérieur du corps ses os (qu’il soutient entre eux), ses muscles et ses organes (étant lui-même un organe), il fait l’objet d’un intérêt toujours croissant de plusieurs communautés scientifiques (que ce soit en anatomie, en neurologie, ou en psychologie…) Des pratiques telles que l’acupuncture, l’ostéopathie ou la fasciathérapie ont intuitionné et ou compris l’importance de le stimuler, et notamment, relativement à l’impact positif que ses manipulations et ou mouvements peuvent avoir sur nos états mentaux, le fascia semblant emmagasiner littéralement les affects, les traumatismes :
« les fascias réagissent au stress émotionnel de manière progressive et durable » Robert Schleip (psychologue et biologiste)
Or, nous le savons, un trauma non considéré comme tel ou non pris en charge dans le cadre d'une thérapie peut résonner longtemps , très longtemps… et transparaitre à travers tout un tas de blocages, résistances, « symptômes »… Qu’une pratique de Yin yoga contribuera à dépasser, si ce n’est, à dissoudre.
pour aller plus loin sur la question :
« Les alliés cachés de notre organisme.
Les fascias »,
Kirsten Esch, Arte, 2016
https://www.arte.tv/fr/videos/070788-000-A/les-allies-caches-de-notre-organisme-les-fascias/